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Asie : Aiguillonner l’aspiration à la paix

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Asie : Aiguillonner l’aspiration à la paix
CHEN Yan
Historien et directeur général du Forum China Europa

C’est peut-être une coïncidence si, peu de temps après la célébration du 50ème anniversaire de réconciliation franco-Allemande, le prix Nobel de la Paix a été décerné à l’Union Européenne. Mais rares sont ceux, y compris en Asie, qui doutent aujourd’hui que le fondement de la paix en Europe depuis soixante ans est la réconciliation franco-allemande. En tout cas, en Chine, le fait historique est connu et reconnu à la fois par les autorités et par l’opinion publique, et si l’idée de suivre l’exemple de cette réconciliation pour faire la paix avec le Japon ne fait pas encore consensus, elle est du moins largement partagée.

L’impact positif en Chine de la réconciliation franco-allemande tient, d’une part, au résultat tangible de la paix qui règne en Europe depuis la Seconde guerre mondiale, et au désir d’apaiser le conflit récurent sino-japonais de l’autre. Il est facile à comprendre pourquoi la presse chinoise ne cesse de mettre en parallèle les conflits du passé entre la France et l’Allemagne et ceux qui subsistent entre le Japon et la Chine. Les similitudes sautent aux yeux : il s’agit de deux frères ennemis historiques, de deux guerres destructrices en l’espace de cinquante ans (en 1895, puis en 1937), d’une rivalité économique et diplomatique pour savoir qui sera le plus puissant pays d’Asie… Les récentes et violentes manifestations anti-japonaises en Chine nous rappellent la haine historique et la profondeur de l’incompréhension entre ces deux peuples. Pourquoi, après la Seconde guerre mondiale, la France et l’Allemagne ont pu se réconcilier et non la Chine et le Japon ? Les arguments qui sont souvent avancés pour répondre à cette question, sont, non sans raison, qu’il subsiste une dictature d’un côté, et un refus d’examen autocritique sur les crimes de guerre de l’autre. Il est rare que l’on mette en lien le rôle joué par l’U.E. et la construction de la paix en Europe. En 2005, le Forum China Europa, en organisant en Chine une conférence sur la construction européenne, est parvenu à faire passer l’idée au cœur de l’opinion chinoise que le processus de la construction européenne jouait un rôle central dans la réconciliation entre l’Allemagne et la France.

Il est vrai que l’aspiration à la paix est une volonté constante de l’humanité, mais il n’en est pas moins vrai que l’histoire de l’humanité regorge de guerres et d’autres formes de violences et de cruauté. Pourquoi les hommes, qui veulent théoriquement tous la paix, se trouvent-ils confrontés malgré eux à la guerre ? La guerre et la paix s’entraînent-elles forcément l’une l’autre en un cercle vicieux ? Peut-on y échapper et construire un modèle qui transcende l’Etat-Nation et qui nous permettrait de dire adieu à la guerre ? La construction européenne répond justement à cette quête d’un modèle qui dépasse le cadre de l’Etat-Nation et qui donne la possibilité d’un partage de pouvoir équilibré. Le chemin de la construction européenne est aussi celui de la recherche d’un nouveau système social pour l’humanité et d’un nouveau regroupement social qui dépasse les limites culturelles et religieuses. La pratique de l’Union Européenne nous donne l’espoir de sortir du cercle historique de la violence, de la tyrannie, de la guerre, et de l’hégémonie. L’exemple de la réconciliation franco-allemande illustre bien le fait que, s’il n’y avait pas eu un cadre supérieur pour l’Europe, la conception commune d’un intérêt supranational ainsi qu’un objectif final d’élaboration d’un nouveau mode de relation entre les Etats, la réconciliation historique entre la France et l’Allemagne aurait été, sinon inconcevable, tout du moins très fragile.

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